Quel est l'impact de la législation européenne sur le whistleblowing?

La whistleblowing est devenue un sujet de préoccupation lorsque les conséquences majeures produites par Swiss Leaks et Lux Leaks ont plaidé en faveur d'un changement du cadre européen. Dans les deux cas, les dénonciateurs travaillaient pour des entreprises privées avant de divulguer des informations. Si leur situation devait se répéter maintenant, seraient-ils protégés ?

Launch of whistleblowing directive
Dans notre dernier article sur le sujet, nous avons souligné la nécessité de renforcer la protection des lanceurs d'alerte. En octobre 2019, la directive 2019/1937 relative à la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l'Union a été adoptée. Les États membres avaient jusqu'au 17 décembre 2021 pour la transposer en droit national.


La mission de la directive est de poursuivre les objectifs de l'ancien accord provisoire et de consolider le cadre européen avec une législation directement applicable, approfondie et large sur cette question. Dans cet article, nous allons examiner si cette législation offre une protection suffisante aux dénonciateurs et aux entités touchées par la fuite d'informations confidentielles.


Quel est le champ d'application de la directive sur les dénonciations ?


Champ d'application matériel

Les matières européennes suivantes sont incluses dans le champ d'application : les marchés publics, les services, produits et marchés financiers, la prévention du blanchiment d'argent et du financement du terrorisme, la sécurité et la conformité des produits, la sécurité des transports, la protection de l'environnement, la radioprotection et la sûreté nucléaire, la sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux, la santé et le bien-être des animaux, la santé publique et la protection des consommateurs, la protection de la vie privée et des données personnelles, la sécurité des réseaux et des systèmes d'information, et la fiscalité des entreprises. Néanmoins, les États membres sont libres d'étendre la portée des questions protégées comme ils l'entendent.

Par dérogation, cette directive ne s'applique pas aux signalements d'infractions concernant la défense, la sécurité ou les règles nationales, ainsi que les droits des travailleurs à consulter leurs représentants ou leurs syndicats. L'exclusion de la défense est compréhensible. Les règles de défense ont toujours été, selon les principes du droit international public, considérées comme faisant partie de la souveraineté d'un État. Sur la base de ces principes, l'UE a choisi de rester en dehors de ces questions en excluant la défense du champ de compétence de l'Union (traité sur le fonctionnement de l'Union européenne).

Portée personnelle

La directive s'applique à tous les déclarants travaillant dans le secteur privé ou public qui ont acquis des informations dans un contexte professionnel actuel ou passé. La protection s'applique également aux facilitateurs, c'est-à-dire aux tiers ou aux entités juridiques appartenant à un déclarant ou liés à lui (dans un contexte professionnel). Les facilitateurs sont des personnes qui aident les déclarants dans le processus de déclaration dans un contexte professionnel, et dont l'aide doit rester confidentielle.

Exigences en matière de rapports

Les dénonciateurs pourront bénéficier d'une protection si, au moment de la dénonciation, ils avaient des motifs raisonnables de croire que l'information rapportée était vraie et s'ils ont dénoncé par un canal interne, un canal externe ou ont fait une divulgation publique. Un canal interne implique la divulgation d'informations à une source au sein de l'organisation tandis qu'une dénonciation externe implique la divulgation d'informations en dehors de l'organisation.

La divulgation publique d'informations sera protégée si ces informations peuvent mettre en danger l'intérêt public ou si les rapports internes et externes ont été inefficaces.

Sur la base du rapport de la Whistleblowing International Network, 14 États membres n'ont pas commencé ou n'ont fait que des progrès minimes vers la mise en oeuvre de la directive.

Carte de la directive européenne sur le whistleblowing


Quelles sont les répercussions juridiques d'une fuite d'informations ?

Comme les affaires précédentes l'ont clairement montré, être un dénonciateur n'est pas une tâche facile. Le terme "whistleblowing" vient du sport, où les arbitres sifflent pour arrêter un jeu illégal ou une faute.

Après avoir divulgué des informations, les dénonciateurs se heurtent souvent à la critique publique ou, pire encore, à des représailles telles que des menaces ou des poursuites judiciaires. Pour prendre un exemple célèbre, Julian Assange, est actuellement détenu en prison au Royaume-Uni pour avoir divulgué des milliers de documents classifiés du gouvernement américain et risque l'extradition.
Whistleblower retaliation


La directive a fait quelques pas en avant en interdisant toute forme de représailles. Les représailles peuvent notamment consister en une suspension, une discrimination, un préjudice, une résiliation anticipée du contrat et une réduction de salaire.

Pour lutter contre les actions en justice prévisibles, la directive impose à tous les États membres de fournir une assistance juridique aux lanceurs d'alerte protégés par le champ d'application, ainsi qu'une compensation et une réparation. Des informations ou des conseils complets et indépendants, facilement accessibles au public et gratuits, doivent également être fournis.


Comment les entités sont-elles touchées ?

Les entités privées et publiques doivent suivre certaines directives pour être en conformité avec le règlement sur la dénonciation. Les changements obligatoires diffèrent selon le secteur.

Similitudes

Il existe un socle commun de règles applicables tant aux entités privées que publiques. L'établissement d'une chaîne interne en fait partie. Afin d'augmenter la transparence et l'équité de la procédure interne, les entités devraient :

  • 1

    mettre en place un canal pour recevoir les rapports;

  • 2

    accuser réception du rapport dans les 7 jours;

  • 3

    désigner une personne impartiale ou un service compétent chargé du suivi des rapports;

  • 4

    mettre en place un suivi assidu;

  • 5

    définir un délai raisonnable pour fournir un retour d'information, ne dépassant pas trois mois à compter de l'accusé de réception;

  • 6

    fournir des informations accessibles sur la procédure externe;



Différences

Toutes les entités du secteur privé comptant 50 travailleurs ou plus doivent mettre en place un canal de signalement interne. Under that threshold, there is no mandate for the creation of an internal channel. This threshold is not applicable to entities working in financial services, products and markets, and prevention of money laundering and terrorist financing. Toutes les entités juridiques du secteur public doivent mettre en place un canal interne de notification, y compris les autres entités qu'elles peuvent posséder ou contrôler.


Comment la directive sur les lanceurs d'alerte assurerait-elle une protection aujourd'hui ?

Si les Lux et Swiss Leaks se répétaient maintenant, les dénonciateurs rempliraient-ils les conditions de la directive ? Faisons un cas pratique à partir de ces deux exemples.

Tout d'abord, les Swiss Leaks et Lux Leaks concernaient tous deux l'évasion fiscale, qui est une question protégée dans le cadre du champ d'application matériel. Deuxièmement, en ce qui concerne le champ d'application personnel, les deux dénonciateurs se trouvaient dans un contexte professionnel lors de leur divulgation. Par conséquent, cette condition est également remplie. La troisième condition exige l'utilisation d'un canal interne ou externe avant la divulgation ou l'utilisation directe d'une divulgation publique lorsque l'information peut constituer un danger pour l'intérêt public.

Hypothétiquement, si les dénonciateurs avaient des motifs raisonnables de croire que l'information était un danger pour l'intérêt public, cette condition aurait pu être remplie également.

Conditions de la directive
Swiss Leaks
Lux Leaks
L'information concerne l'une des matières protégées
Oui - l'évasion fiscale
Oui - l'évasion fiscale
Informations recueillies dans un contexte professionnel
Oui
Oui
l'utilisation d'un canal interne, d'un canal externe ou d'une divulgation publique.
Oui - divulgation publique
Oui - divulgation publique


Par conséquent, les dénonciateurs auraient rempli les trois principales exigences et auraient finalement bénéficié de la protection de la directive. Bien entendu, il ne s'agit là que d'une hypothèse.


Comment les lanceurs d'alerte sont-ils protégés en Belgique ?

A ce jour, aucune transposition n'a été faite par le parlement fédéral belge. La Belgique a toutefois conclu un accord provisoire (1380/001) sur le sujet en juin 2020. Par rapport à la directive européenne 2019/1937, le champ d'application de l'accord est plus large sur certains aspects et plus restreint sur d'autres.

Belgium and the whistleblowing directive
D'un point de vue plus général, l'accord étend la protection à ceux qui participent au processus de divulgation (écrivains, journalistes, documentaristes, réalisateurs ou producteurs). L'accord stipule que les informations peuvent être recueillies dans un cadre professionnel ou non. D'un point de vue plus restreint, l'accord n'oblige pas les entreprises à créer des canaux de communication internes, ce qui peut créer un environnement plus sûr pour les employés.


Le point majeur de l'accord provisoire est la création d'un statut juridique pour les personnes reconnues comme lanceurs d'alerte par une décision de justice. En pratique, toute personne pourra saisir la Cour d'appel pour obtenir la reconnaissance du statut juridique du lanceur d'alerte. Une fois que le jugement accordant la reconnaissance du statut juridique du dénonciateur sera prononcé, le dénonciateur et sa famille bénéficieront d'une protection. A notre avis, si elle est mise en ?uvre, elle constituera un élément fort de sauvegarde.

La directive crée un espace plus sûr pour que les dénonciateurs puissent exprimer leurs préoccupations concernant les violations des droits de l'UE. Elle crée des obligations pour les entités privées et publiques afin d'établir des canaux de signalement diligents. L'absence de transposition par certains États membres crée un manque d'efficacité. Les États membres doivent prendre l'initiative et apporter les changements nécessaires. Néanmoins, l'efficacité vient avec le temps. L'adoption de la directive constitue néanmoins un pas important dans la bonne direction.
EU whistleblower directive steps to take
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